La libération vue par les habitants

Le 8 mai 2025, l’Europe commémorera les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Dans la Vallée de Villé, cette date est l’occasion de se souvenir des événements qui ont marqué les villages et aussi les familles. 

La Société d’Histoire de la Vallée de Villé (SHVV) nous propose cette année trois vidéos réalisées à partir des souvenirs de Freddy Dietrich, habitant de Fouchy. Il y raconte ce qu’il a vécu pendant la guerre, lors de la Libération, puis nous emmène dans une visite du village aujourd’hui.

Épisode 1 : Pendant la guerre

Épisode 2 : La libération

Épisode 3 : Le village d’aujourd’hui

Épisode 1 – Des enfants dans la guerre

Souvenirs de Freddy Dietrich, enfant à Fouchy

Cette première vidéo revient sur les souvenirs d’enfance de Freddy Dietrich, né en 1939 à Fouchy, en pleine Seconde Guerre mondiale. À travers ses yeux d’enfant, il évoque la vie quotidienne sous l’occupation allemande, les peurs, les privations… mais aussi l’ingéniosité et la solidarité des habitants.

« Ces films sont dédiés à tous les hommes et femmes de la Vallée de Villé tués ou qui ont souffert durant les deux guerres mondiales. »

Freddy grandit sans son père, mobilisé, dans une maison partagée avec sa mère, sa petite sœur et ses grands-parents. Il se souvient de l’arrivée des soldats allemands dès 1942 et du jour où sa famille a dû héberger un officier allemand dans leur propre maison. Juste en face, un ancien restaurant avait été transformé en bureau local du NSDAP, le parti nazi.

Les habitants de la vallée devaient s’adapter : chaque foyer devait déclarer ses animaux pour éviter les dénonciations. Mais, comme le raconte Freddy, un deuxième cochon était souvent élevé en cachette, malgré les risques. La peur d’être déporté était omniprésente.

Il évoque aussi le quotidien au jardin d’enfants de Lalaye, géré par des Allemandes et des dames du village, dans une ambiance conviviale malgré le contexte.

Le français était interdit, mais l’allemand autorisait encore l’usage du patois alsacien, le Welsch. Un livre d’aide à destination des habitants, rédigé en allemand et en patois, circulait pour les aider dans cette nouvelle vie imposée. Freddy, alors trop jeune pour lire, passait ses journées à jouer sur le sol, observant les dessins de ce livre.

« On parlait allemand, le français était interdit. »

L’histoire se poursuit avec les départs déchirants des jeunes hommes et des pères de famille. Certains ne reviendront jamais. Il y avait aussi ceux qui tentaient de fuir : à Fouchy, plusieurs habitants se sont illustrés comme passeurs, aidant des prisonniers évadés ou des soldats en fuite à traverser les montagnes pour échapper aux troupes allemandes. Un acte de courage, mais aussi un grand danger : la dénonciation pouvait mener à la déportation.

Enfin, Freddy rappelle que même les adolescents de 16 ans et les hommes de 40 ou 50 ans étaient envoyés au front. Un temps où personne n’était vraiment à l’abri.

Épisode 2 – La libération de Fouchy

Souvenirs de novembre 1944

Dans ce second épisode, Freddy Dietrich revient sur un moment clé : la libération de Fouchy, le 23 novembre 1944. Ce jour-là, les troupes américaines, notamment la « Division Cactus », arrivent par les chemins forestiers du col de Noirceur. La nuit suivante, plus de 200 personnes trouvent refuge dans une ferme, cherchant à fuir les combats encore proches.

Le lendemain, le 24 novembre, les Allemands quittent la zone. La route utilisée par les troupes américaines pour libérer Fouchy devient le symbole de cette délivrance. D’autres villages de la vallée, comme Maisonsgoutte ou Lalaye, ont connu une libération plus difficile, souvent marquée par une forte résistance allemande et des combats intenses, notamment du côté de l’Ungersberg.

Freddy évoque aussi l’arrivée des troupes coloniales françaises, notamment des Goumiers marocains, logés à Fouchy dans une ancienne auberge. Il se souvient de leur gentillesse, de moments partagés autour de jeux de cartes, et de leur intégration chaleureuse dans le quotidien du village.

Mais la libération ne fut pas que joie. Les bombardements qui l’ont précédée ont marqué les habitants : maisons détruites, familles réfugiées dans les caves, parfois à plus d’une dizaine par pièce. L’arrivée des libérateurs fut donc vécue avec un mélange de soulagement et de douleur.

Épisode 3 – Fouchy, d’hier à aujourd’hui

Mémoire d’un village

Dans le dernier épisode, Freddy Dietrich nous emmène dans les rues de Fouchy, entre souvenirs personnels et mémoire collective. Il évoque l’histoire des trois cloches de l’église, descendues par les Allemands en 1944, comme cela s’était déjà produit en 1917. Après la guerre, les habitants se mobilisent pour les remonter, mais découvrent qu’une d’elles est fissurée. Elle devra être envoyée en fonderie à Sainte-Marie-aux-Mines, puis réinstallée trois mois plus tard.

Devant le monument aux morts, il partage une anecdote touchante : une des inscriptions rendait hommage à Ernest Valentin, disparu sur le front russe. Mais sa famille, longtemps sans nouvelles, demandera à retirer son nom par respect et incertitude. Ce n’est que plus tard que l’on apprendra la vérité : Ernest est mort peu après la perte de son meilleur ami, dans des conditions très difficiles.

Freddy évoque aussi ses souvenirs de la résistance discrète au sein du village.

 

Transmettre pour ne pas oublier

À travers les témoignages de Freddy Dietrich et le travail de mémoire de la SHVV, c’est toute une époque qui ressurgit, vue à hauteur d’enfant mais enrichie de souvenirs d’adultes.

Que ce 8 mai 2025 soit l’occasion de se souvenir, non seulement des soldats, mais aussi des familles, des passeurs, des réfractaires, des femmes et des enfants, tous acteurs à leur manière de cette histoire collective.

Les trois vidéos de Freddy Dietrich sont disponibles dès maintenant sur le site de la SHVV via ce lien : ICI 

Le livre « 60 ans après, la Vallée se souvient » sera consultable en ligne sur leur site dès le 8 mai 2025.